RetourAccueil

Témoignage de Georges

A

yant 46 ans ce mois d'avril [2005 - note du webmestre], j'ai appris beaucoup de choses sur la vie, et j'en ai beaucoup à apprendre. Avoir grandi avec le syndrome d'Asperger sans savoir ce que c'était ne fût pas toujours facile. Ma famille, et le personnel de mon école ont cherché à m'aider comme ils le pouvaient. On disait que j'avais un « trouble émotif », ou bien un « trouble d'adaptation ».

Photo de Georges Huard

J'ai appris à parler vers l'âge de 4 ans selon ma mère, et ensuite je suis devenu un « moulin à paroles », posant plein de questions sur tous les nouveaux mots que je lisais, sur les insectes, et autres sujets qui me trottaient dans la tête.

J'ai fait ma part de crises, surtout si ma mère changeait d'idée par rapport à une sortie, ou une activité. Les changements étaient difficiles à traverser. Je trouvais que les gens aimaient tout bouleverser pour faire changement.

J'ai vécu dans un monde en changement constant, et j'ai vu des changements en technologie, qui m'ont fasciné, comme la venue des ordinateurs personnels, les écrans plats, les montres numériques. Par contre les modes vestimentaires changeaient tout le temps sans suivre une évolution (parfois avant-gardiste avec des nouveautés comme l'unisexe, ou les cheveux longs pour les hommes), donc lorsque la mode suivante contredisait la précédente, cela me décourageait beaucoup.

L'informatique est une passion qui ne m'a pas quitté, et cette passion à commencé vers l'âge de 12 ans, quand un professeur de maths de mon école m'a fait visiter un centre de calcul. J'ai pu voir une calculatrice scientifique programmable avec des cartes magnétiques et depuis, je suis passionné par l'informatique. J'ai suivi des cours techniques et j'ai eu mon diplôme.

J'ai été embauché peu après avoir fini mes cours d'informatique, et mon premier boulot ne dura que 8 mois. Ce sont mes habilités sociales qui ont tout gâché. J'ai compris qu'il y avait un horaire de 9 heures à 17 heures et je le respectais à la lettre. Parfois on avait des périodes où nous devions travailler plus longtemps, mais je ne pouvais pas savoir qu'il fallait rester davantage pour aider. Un jour on me mit à la porte.

Cinq mois plus tard, je trouvais mon second travail. Pour me voir à mon second boulot, cliquez sur le lien suivant : Icône pour un lien « de Jeunes cracks de l'informatique », où on me voit témoigner sur mon travail de programmeur chez Logidisque, en 1983. Portez attention aux coiffures de l'époque.

En 1988, après avoir eu de la difficulté à me trouver du boulot en informatique, je travaillais comme messager en vélo, ce jusqu'à 1997. C'était une phase de ma vie, où je découvrais les ascenseurs des tours de bureau de Montréal, les graphistes qui délaissaient leurs tables à dessins pour l'ordinateur, et l'avancement informatique des années 90 dans les bureaux. Je me suis inséré dans l'UQAM, grâce à un prof que j'ai connu lors d'une rencontre avec des parents de personnes autistes.

C'est que je cherchais de l'aide pour sortir mon frère Antoine du pétrin de la psychiatrie. Antoine est mon frère autiste de Kanner, qui en 1982 avait fait une crise de trop, et ma mère avait appelé la police, et il fût placé dans un hôpital psychiatrique. Après 5 ans de combat on a pu convaincre le système de santé que la psychiatrie est un traitement mal approprié pour l'autisme. Maintenant mon frère est dans un appartement supervisé, et il travaille 5 jours semaine.

Grâce à Autisme et Trouble Envahissants de Montréal, je suis entré en contact avec le Dr. Laurent Mottron, afin d'obtenir un diagnostic officiel de mon syndrome d'Asperger. Ce diagnostic m'a éclairci sur mes difficultés, et j'ai vu que les défauts que l'on me reprochait coïncidaient avec les symptômes de l'autisme. Surtout l'incapacité de lire les expressions non-verbales, et la difficulté de reconnaître les gens.

Mon côté « a-contextuel » était mis en évidence par le diagnostic, ainsi que mes intérêts « spécialisés » (ou restreints) avec lesquels j'embêtais les gens. Le diagnostic me permet de mieux organiser ma vie, et de choisir mes fréquentations : des gens avec lesquels je peux parler beaucoup. Pas des gens mystérieux et introvertis.

Je suis visuel, et étant donné que l'abstrait m'échappe, je préfère des activités concrètes comme l'informatique. Le diagnostic ne guérit pas, mais aide à mieux comprendre, et mettre le doigt sur le problème. On peut orienter sa vie vers des domaines ou on a les meilleurs compétences.

On évite les domaines où on va constamment être en échec : on remplace les sports d'équipe par des sports « individuels », on ne fait pas carrière dans la vente (car cela demande des habilités sociales hors du commun, ce qui est difficile pour une personne atteinte du syndrome d'Asperger).

Le diagnostic est opportun pour que les autres me comprennent mieux. Ils ne se choquent plus si je passe à côté d'eux sans leur dire bonjour. Ils ne sont plus offusqués si je ne décode pas les non-dits. Mais hélas certains ont encore leurs attentes frustrées vis-à-vis de moi. Certains ne voudront pas comprendre.

Le fait de travailler en milieu universitaire aide beaucoup, car les gens sont plus ouverts à la différence.

En 1997, j'ai commencé à travailler comme technicien informatique à l'UQAM (l'université du Québec), et je suis souvent demandé pour faire des présentations, par des groupes de parents, des écoles, des universités. Ces présentations ont pour but de sensibiliser les gens au vécu de la personne autiste, et comment l'aider à accéder à une qualité de vie.

Georges Huard, de Montréal.

Lire et voir également




Valid HTML 4.01! Revenir en haut de la page Valid CSS2!